Les charges sont les dépenses liées à l’usage, à l’entretien ou à l’amélioration des locaux loués. Elles peuvent être réparties entre le bailleur et le locataire selon les modalités prévues dans le contrat de bail, sous réserve du respect de certaines règles légales. Les charges ont également un impact fiscal pour les parties, puisqu’elles peuvent être déduites de leur revenu imposable sous certaines conditions. Dans cet article, nous allons examiner les aspects juridiques et fiscaux des charges dans le cadre d’un bail commercial. Nous verrons successivement : 1) La répartition des charges entre le bailleur et le locataire, 2) La déduction fiscale des charges pour le locataire, 3) La déduction fiscale des charges pour le bailleur.
La répartition des charges entre le bailleur et le locataire
Le principe de la liberté contractuelle
Le bail commercial est un contrat qui obéit au principe de la liberté contractuelle. Cela signifie que les parties sont libres de fixer les modalités de répartition des charges dans le contrat de bail, en fonction de leurs intérêts respectifs. Ainsi, le bailleur et le locataire peuvent convenir de la nature, du montant et du mode de paiement des charges, ainsi que de la périodicité et des modalités de révision. Le contrat de bail doit mentionner clairement les charges qui sont à la charge du locataire et celles qui sont à la charge du bailleur, afin d’éviter toute confusion ou contestation ultérieure.
Les limites de la liberté contractuelle
Toutefois, la liberté contractuelle n’est pas absolue et doit respecter certaines règles légales qui visent à protéger le locataire. Ces règles sont les suivantes :
- Le bailleur doit établir un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances qui sont à la charge du locataire. Cet inventaire doit être annexé au contrat de bail et faire l’objet d’un état récapitulatif annuel.
- Le bailleur ne peut pas mettre à la charge du locataire les dépenses relatives aux grosses réparations, c’est-à-dire celles qui concernent les gros murs et les voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières, les digues, les murs de soutènement et de clôture en entier. Ces dépenses sont à la charge du bailleur, sauf si elles sont occasionnées par le fait du locataire.
- Le bailleur doit informer le locataire des travaux qu’il réalise ou qu’il envisage de réaliser dans les locaux loués, ainsi que de leur coût et de leur incidence sur le montant des charges. Le locataire peut contester le caractère récupérable des charges ou demander une diminution du loyer si les travaux entraînent une modification de la consistance ou de la qualité des locaux.
Exemples de charges courantes
Les charges courantes sont les dépenses liées à l’usage, à l’entretien ou à l’amélioration des locaux loués. Elles peuvent être réparties entre le bailleur et le locataire selon les modalités prévues dans le contrat de bail. Voici quelques exemples de charges courantes qui peuvent être à la charge du locataire ou du bailleur :
- Les taxes : il s’agit principalement de la taxe foncière, de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, de la taxe sur les bureaux, de la contribution économique territoriale, etc. Ces taxes sont généralement à la charge du bailleur, sauf si le contrat de bail prévoit le contraire.
- Les assurances : il s’agit des assurances souscrites par le bailleur ou le locataire pour couvrir les risques liés aux locaux loués, tels que l’incendie, le dégât des eaux, le vol, la responsabilité civile, etc. Ces assurances sont généralement à la charge du locataire, sauf si le contrat de bail prévoit le contraire.
- L’entretien : il s’agit des dépenses nécessaires au maintien en bon état des locaux loués, tels que le nettoyage, la réparation, le remplacement, etc. Ces dépenses sont généralement à la charge du locataire, sauf si le contrat de bail prévoit le contraire.
- Le chauffage et l’électricité : il s’agit des dépenses liées à la consommation d’énergie dans les locaux loués. Ces dépenses sont généralement à la charge du locataire, sauf si le contrat de bail prévoit le contraire.
L’obligation d’information du bailleur sur les charges
Le principe de la transparence des charges
Le bailleur qui met à la charge du locataire tout ou partie des charges du bail commercial doit respecter le principe de la transparence des charges, qui vise à assurer l’information et le contrôle du locataire sur les dépenses qui lui sont imputées. Ce principe implique que le bailleur doit fournir au locataire des documents et des informations précis, complets et actualisés sur les charges, afin de lui permettre de vérifier leur réalité, leur montant et leur répartition.
Les obligations d’information du bailleur avant la conclusion du bail
Avant la conclusion du bail commercial, le bailleur doit informer le locataire des charges qui seront à sa charge, en lui remettant un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances qui seront récupérables. Cet inventaire doit être annexé au contrat de bail et faire l’objet d’un état récapitulatif annuel. Le bailleur doit également informer le locataire du mode de répartition des charges entre les différents locataires du même immeuble, ainsi que du mode de calcul et de paiement des provisions sur charges.
Les obligations d’information du bailleur pendant l’exécution du bail
Pendant l’exécution du bail commercial, le bailleur doit informer le locataire des charges qui lui sont imputées, en lui fournissant les documents et les informations suivants :
- Les factures ou les quittances justifiant le montant des charges, qui doivent être tenues à la disposition du locataire pendant six mois à compter de l’envoi de l’état récapitulatif annuel.
- L’état récapitulatif annuel des charges, qui doit être envoyé au locataire dans les trois mois suivant la clôture de chaque exercice comptable. Cet état doit mentionner le montant total des charges, la ventilation par catégorie de charges, le mode de répartition entre les locataires, le montant des provisions versées par le locataire, le solde à payer ou à rembourser par le locataire.
- L’information sur les travaux réalisés ou à réaliser dans les locaux loués, qui doit être communiquée au locataire avant le début des travaux, ainsi qu’à la fin des travaux. Cette information doit préciser la nature, le coût et l’incidence des travaux sur le montant des charges.
La déduction fiscale des charges pour le locataire
Les conditions de la déduction fiscale des charges
Le locataire qui exerce une activité commerciale, industrielle ou artisanale peut déduire les charges du bail commercial de son bénéfice d’exploitation, à condition de respecter les conditions suivantes :
- Le montant du loyer ne doit pas être excessif, c’est-à-dire qu’il doit correspondre à la valeur locative du bien loué, en tenant compte de sa situation, de sa superficie, de son état, de son équipement, etc. Si le loyer est jugé excessif par l’administration fiscale, il peut être réduit ou requalifié en revenu imposable pour le locataire.
- Les locaux loués doivent être affectés à l’exercice de l’activité du locataire, c’est-à-dire qu’ils doivent être utilisés pour les besoins de son exploitation, et non pour des fins personnelles ou étrangères à son activité. Si les locaux sont partiellement affectés à l’activité du locataire, seule la quote-part correspondante peut être déduite.
- Les charges doivent être justifiées par des factures ou des quittances établies au nom du locataire, qui doivent mentionner le montant, la nature et la période des charges. Le locataire doit conserver ces documents pendant six ans à compter de la date de clôture de l’exercice auquel ils se rapportent.
Les charges déductibles immédiatement ou par amortissement
Les charges du bail commercial peuvent être déduites immédiatement ou par amortissement, selon leur nature et leur montant :
- Les charges d’entretien et de réparation sont déductibles immédiatement, c’est-à-dire qu’elles sont comptabilisées en charges d’exploitation dans l’exercice au cours duquel elles sont engagées. Il s’agit des dépenses nécessaires au maintien en bon état des locaux loués, telles que le nettoyage, la réparation, le remplacement, etc.
- Les charges de grosses réparations sont déductibles par amortissement, c’est-à-dire qu’elles sont réparties sur la durée du bail ou de l’utilisation du bien. Il s’agit des dépenses qui augmentent la valeur ou la durée de vie des locaux loués, telles que la réfection de la toiture, le ravalement de la façade, la rénovation du système électrique, etc.
Les charges non déductibles
Certaines charges du bail commercial ne sont pas déductibles du bénéfice d’exploitation du locataire, car elles sont considérées comme des dépenses d’ordre personnel ou financier. Il s’agit notamment des charges suivantes :
- Les charges relatives à l’acquisition ou à la cession du droit au bail, c’est-à-dire les sommes versées par le locataire pour obtenir ou céder le droit d’occuper les locaux loués, telles que le pas-de-porte, le droit d’entrée, l’indemnité d’éviction, etc.
- Les charges relatives à la constitution ou à l’augmentation du capital social, c’est-à-dire les sommes versées par le locataire pour participer au capital de la société qui lui loue les locaux, ou pour augmenter sa participation.
- Les charges relatives aux intérêts d’emprunt, c’est-à-dire les sommes versées par le locataire pour rembourser un emprunt contracté pour financer le loyer ou les charges du bail commercial.
La déduction fiscale des charges pour le bailleur
La catégorie d’imposition des revenus du bailleur
Le bailleur qui loue des locaux à un locataire qui exerce une activité commerciale, industrielle ou artisanale peut percevoir des revenus de différentes natures, selon le type de location :
- La location nue : il s’agit de la location de locaux sans aucun meuble ni matériel. Dans ce cas, les revenus du bailleur sont imposés dans la catégorie des revenus fonciers, sauf si le bailleur est une société soumise à l’impôt sur les sociétés.
- La location meublée : il s’agit de la location de locaux comportant au moins un mobilier suffisant pour permettre au locataire d’y vivre normalement. Dans ce cas, les revenus du bailleur sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), sauf si le bailleur est une société soumise à l’impôt sur les sociétés.
- La location intégrant du matériel : il s’agit de la location de locaux comportant du matériel nécessaire à l’exercice de l’activité du locataire, tel que des machines, des outils, des équipements, etc. Dans ce cas, les revenus du bailleur sont imposés dans la catégorie des BIC, sauf si le bailleur est une société soumise à l’impôt sur les sociétés.
Les régimes d’imposition des revenus du bailleur
Le bailleur qui perçoit des revenus fonciers ou des BIC peut opter pour l’un des deux régimes d’imposition suivants :
- Le régime réel : il s’agit du régime de droit commun, qui consiste à déclarer le montant réel des revenus perçus et des charges supportées. Ce régime permet de bénéficier de la déduction de toutes les charges effectivement engagées, y compris les charges d’amortissement. Ce régime est obligatoire si les revenus du bailleur dépassent un certain seuil, qui varie selon la nature des revenus (fonciers ou BIC) et le type de location (nue, meublée ou intégrant du matériel).
- Le régime forfaitaire : il s’agit d’un régime simplifié, qui consiste à déclarer le montant brut des revenus perçus, sans tenir compte des charges supportées. Ce régime permet de bénéficier d’un abattement forfaitaire sur les revenus, qui varie selon la nature des revenus (fonciers ou BIC) et le type de location (nue, meublée ou intégrant du matériel). Ce régime est facultatif si les revenus du bailleur ne dépassent pas un certain seuil, qui varie selon la nature des revenus (fonciers ou BIC) et le type de location (nue, meublée ou intégrant du matériel).
Les charges déductibles selon le régime choisi
Les charges du bail commercial que le bailleur peut déduire de ses revenus imposables varient selon le régime d’imposition choisi :
- Sous le régime réel, le bailleur peut déduire les charges suivantes :
- Les charges foncières : il s’agit des dépenses liées à la propriété du bien loué, telles que la taxe foncière, les frais de gestion, les honoraires de syndic, etc.
- Les charges financières : il s’agit des dépenses liées au financement du bien loué, telles que les intérêts d’emprunt, les frais d’acquisition, les frais de notaire, etc.
- Les charges d’exploitation : il s’agit des dépenses liées à l’usage, à l’entretien ou à l’amélioration du bien loué, telles que le chauffage, l’électricité, l’assurance, la réparation, etc.
- Les charges d’amortissement : il s’agit de la dépréciation du bien loué ou de ses éléments constitutifs, qui peut être calculée selon différents modes (linéaire, dégressif, exceptionnel, etc.).
- Sous le régime forfaitaire, le bailleur ne peut pas déduire les charges réelles, mais bénéficie d’un abattement forfaitaire sur ses revenus, qui tient compte de manière globale des charges supportées. Le taux de l’abattement varie selon la nature des revenus (fonciers ou BIC) et le type de location (nue, meublée ou intégrant du matériel). Par exemple, pour les revenus fonciers provenant d’une location nue, l’abattement est de 30%, tandis que pour les BIC provenant d’une location meublée, l’abattement est de 50%.